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On est tous des intimidateurs

par | 22 Fév 2021 | Bien-être et santé | 0 commentaires

As-tu déjà été intimidée au point de te sentir cassée de l’intérieur? As-tu déjà embarqué dans la méchanceté collective d’un groupe envers une personne qui dérange par sa différence? Ça fait des mois que je porte cet article dans mon cœur. C’est un sujet qui me touche, car j’en ai fait les frais pendant de trop nombreuses années. C’est malheureusement aussi un sujet qui me révolte, car non seulement 40 ans plus tard des jeunes en sont encore victimes, mais des adultes aussi, sur le marché du travail. De plus, sans s’en rendre compte, on perpétue facilement les comportements intimidants.

Un mot qui n’existait pas dans les années 80

Mes premières expériences d’intimidation ont débuté au primaire. À cette époque, on ne parlait pas d’intimidation, c’est comme si le mot n’existait pas. On se faisait achaler, taquiner, écœurer, etc. Et on nous conseillait d’ignorer. Pourtant, même si les mots semblaient anodins, la situation ne l’était pas.

Je revenais de l’école, je m’adossais contre le mur de la maison pour pleurer avant d’entrer dans la maison. Un jour, ma mère s’en est rendu compte. J’ai dû lui expliquer ce qui se passait. Et c’est ainsi qu’a commencé, ce que j’appellerais la descente aux enfers.

Comme toute bonne mère, elle n’a pas voulu que la situation perdure, il fallait faire quelque chose. En toute bonne foi, et avec sa bonne volonté, elle a discuté avec les parents des enfants qui « achalaient » sa fille dans l’autobus. Elle a discuté avec le directeur lorsque ça se passait dans la cour d’école. Je ne connais pas tous les détails de ce qu’elle a fait pour tenter de remédier à la situation, ni ce que les autres parents ont dit à leurs enfants, mais je garde des souvenirs amers de la suite.

La descente aux enfers

Que penses-tu qu’il se passait le lendemain dans l’autobus? Oui, tu as bien deviné. C’était le même scénario, mais avec plus de haine et de rage au cœur. L’enfant qui s’était fait gronder ou punir m’en voulait à mort et me le faisait sentir, crois-moi! Ben oui, si au début il faisait ça pour faire le smart, là il était en colère, les autres enfants étaient au courant que j’avais rapporté l’histoire, m’en voulaient aussi et se mettaient de la partie. Ça avait commencé par un tirage de pompon sur ma tuque (tsé celle qui reste sur la tête, attachée solidement par des cordons sous le menton, celle qu’ils ne pouvaient pas se lancer à travers l’autobus) et ils ont ajouté à ça les railleries, les regards moqueurs, méprisants et les insultes. Combien de fois crois-tu que je me sois fait traiter de bébé lala qui avait pleurniché à sa maman? Pourtant, si ça avait été rien que de moi, elle ne l’aurait jamais su. J’ai décidé de garder la suite pour moi et d’endurer. Je ne lui ai jamais parlé de l’intimidation qui s’est poursuivie au secondaire et au cégep. Il n’en était pas question. J’avais eu ma leçon.

Je garde le secret

Ce qui est renversant dans tout ça, c’est que si je n’avais pas été cardiaque, probablement que je n’en aurais pas eu d’intimidation. Parce que j’avais la santé fragile, j’étais habillée pour aller au pôle Nord, et ce, beaucoup trop tôt par rapport aux autres enfants. C’est ce qui me faisait détonner des autres. Si seulement j’avais eu le réflexe d’enlever ma cr*** de tuque dans l’autobus! Aujourd’hui, tu sais ce qui ne fait pas partie de ma garde-robe… Exactement, je n’ai pas de tuque, même sans pompon, même sans cordons, je ne veux rien savoir de mettre une tuque. Je suis traumatisée à vie. ? À la place, il y a le capuchon de mon manteau, et j’ai acheté un casque de poils pour les marches à l’extérieur, n’importe quoi, sauf une tuque. ?

Ce que j’ai compris en thérapie

Dans la trentaine, mon estime et ma confiance en moi étaient quasi inexistantes. J’ai entrepris une thérapie. Évidemment, l’intimidation a fait partie des premiers sujets abordés. Mon thérapeute m’a fait voir les situations vécues différemment. En fait, j’ai compris que les enfants n’étaient pas méchants pour être méchants. Ils avaient besoin d’un bouc émissaire pour détourner l’action de leur propre blessure, les zones d’ombre qu’ils ne voulaient pas éclairer. Ben oui, le ti-cul dans les plus petits de la classe avait besoin de ridiculiser la fille qui devait porter ses salopettes d’hiver en plein mois d’octobre. Ça le faisait se sentir plus grand et cool et il croyait avoir besoin de ça pour se sentir dans la gang.

J’ai compris pour les enfants, mais aujourd’hui quand je vois les adultes agir, je ne comprends pas du tout et ça me révolte. Nous ne sommes plus des enfants d’école. On devrait avoir évolué!

Quand l’intimidation se poursuit sur le marché du travail

On parle d’intimidation lorsque les enfants et les adolescents en sont victimes. Pourtant, on dirait que le mot n’existe plus rendu à l’âge adulte. On va parler de harcèlement, de jalousie, de commérage, de préjugé, d’homophobie, de racisme, etc., mais pas d’intimidation. Pourtant, ça existe, elle prend différentes formes et peut devenir très grave.

Si on se fie au dictionnaire Larousse, intimider, c’est « inspirer à quelqu’un une crainte, un trouble qui lui font perdre son assurance ». Et malheureusement, dans mes 30 ans de carrière, j’en ai subi dans mes premières années, mais j’en ai surtout trop vu.

Avec mon texte, je désire qu’on prenne conscience de toutes ces phrases anodines qui sont dites aux autres, et qui justement inspirent un trouble, qui fait perdre à l’autre son assurance, sa confiance ou son estime de soi. Tu sais, la collègue de travail qui te tombe sur les nerfs, ça te fait du bien de partager ton ressenti avec une autre collègue et surtout de ressentir que tu n’es pas la seule. Mais pour moi qui ai vécu l’intimidation enfant, j’y vois le même type de comportement destructeur. Si tu vis des frustrations, tu as le droit d’en parler directement et respectueusement à la personne concernée. L’enfant est naïf, a besoin de se valoriser et ne réalise pas le tort qu’il peut faire. Mais en tant qu’adulte, on devrait avoir conscience de l’impact de ses paroles et de ses gestes. Je dis « on » parce que, ben oui, moi aussi ça m’arrive de céder au commérage. On le fait pas mal tous, et c’est ça qui est dangereux. Nous sommes le premier modèle pour nos enfants.

Les enfants, les éponges de nos comportements

J’assume totalement mes prochains propos. Je ne te demande pas d’être d’accord avec moi, juste d’y réfléchir. Je sais que ce ne sera peut-être pas facile à lire. Les enfants ont des radars incorporés à leurs oreilles et leurs yeux. Nous, les adultes, sommes leur modèle numéro un. Ils sont en train de jouer, on jase entre adultes, mais leurs radars scannent tous nos propos. Qu’on le veuille ou non, c’est comme ça. Les adultes sont des modèles pour eux. S’ils nous voient dire ou faire quelque chose, c’est forcément vrai ou correct. Donc, quand on passe un commentaire sur la voisine qui a pris du poids ou le passant qui est « attriqué comme la chienne à Jacques », où est le mal aux yeux de l’enfant? S’il n’y a pas de mal, donc lui aussi peut faire des commentaires avec ses amis sur d’autres personnes. Ne fais pas ce que je fais, fais ce que je te dis. Ça ne marche pas et c’est incohérent. Je nous invite à revisiter nos habitudes, nos paroles au quotidien. C’est pour le bien de tous.

Mon invitation

Dans un esprit de bonté et de bienveillance, je t’invite à porter une attention aux paroles irréfléchies dites et entendues. Tout comme moi, tu vas sûrement t’apercevoir du nombre insoupçonné de phrases qui peuvent faire perdre l’assurance et l’estime d’une personne. Imagine si ça tombe dans les mains d’un enfant qui ne fait pas la différence et perpétue ces habitudes dans la cour d’école et partout. C’est comme ça qu’on peut travailler à créer un monde meilleur. Et éviter à ses enfants de se faire ridiculiser et traiter avec mépris. Le respect, ça commence en soi. Qu’en dis-tu?

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